15/04/2010
Une pause, un instant, merci...
L'écart entre certaines dates de Vox Poetik l'atteste, il est des brèches dans nos vies, des failles où un temps féroce et omnivore semble avaler les heures. Il nous ballote au gré des rues, nous essore et nous laisse, rincés, un peu hagards sur le bord de nos lits et l'on voudrait une pause, un instant, un peu de rien, juste le temps de relire Eluard, merci...
Tous et toutes grains de sable
impalpables dans le vent
Tous et toutes étincelles
sous une ombrelle de feu
Sommes-nous hommes et femmes
de ces enfants que nous fûmes
Le vent s'est désorienté
la lumière s'est brouillée
Un rien nous tient immobiles
réfléchissant dans le noir
20:10 Publié dans Paul Eluard | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : eluard
11/04/2010
Peindre le vent
Dans l'univers poétique d'Alvaro Mutis, il est un jour où Maqroll le Gabier rencontre Alejandro Obregon le peintre. Un jour de soleil et de vent comme aujourd'hui peut-être, un jour où les ombres s'étirent sous l'horizon, un jour où l'on pourrait penser ce que dit le peintre Obregon :
... je veux peindre le vent qui entre par une fenêtre et sort par une autre, comme ça, et rien de plus. Le vent qui ne laisse pas de traces, le vent si pareil à nous, à notre vie, à cette chose qui n'a pas de nom et qui file entre nos mains sans que nous sachions comment.
18:53 Publié dans Alvaro Mutis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mutis
08/04/2010
Tranches de savoir
Sans que cela fut mentionné - erreur - nombre de citations d'Henri Michaux déjà publiées dans Vox Poetik étaient extraites des Tranches de savoir que l'on trouve en collection Poésie/Gallimard dans le volume Face aux verrous. Précisions plus que nécessaires car cet ensemble d'aphorismes et de courts textes est le portrait le plus juste que Michaux fit de lui-même et qu'à ce titre, et pour qui veut découvrir son oeuvre, il est juste indispensable ! C'est là que l'on trouve ces quelques lignes qui sonnent comme des professions de foi :
Attention au bourgeonnement ! Ecrire plutôt pour court-circuiter.
Ne désespérez jamais. Faites infuser davantage.
Le désert n'ayant pas donné de concurrent au sable, grande est la paix du désert.
20:52 Publié dans Henri Michaux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : michaux
07/04/2010
Poème serré
Antoine Emaz a le goût des titres justes. Voici un extrait de Poème serré, comme le serait un café peut-être, que l'on trouve dans Caisse claire, comme sa voix sûrement. C'est un talent particulier, une histoire de souffle, un équilibre, que l'on cherche parfois, souvent en vain. Il l'a trouvé, merci à lui et suivons ses traces.
on va au bout
des mots
du corps
après
on ne résiste plus
après c'est du murmure
de vieux airs qui reviennent
permettent d'attendre encore
là
que ça cesse
00:15 Publié dans Antoine Emaz | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : emaz
04/04/2010
Ce que les hommes disent, parfois...
On en dit des choses sur les hommes et leurs sentiments, sur ce qu'ils ne savent pas dire de leurs sentiments, justement... Mais voilà ce qu'un homme peut dire lorsqu'il est poète et qu'il ouvre son coeur à un autre poète... Après de longues années de correspondances, sans jamais se voir, uniquement dans l'espace de leurs mots, Georges Perros écrit à Bernard Noël :
Pas de distance entre vous et moi, vous êtes là, tous les jours, dans cet espace de tendresse, sémaphore, bouée. De l'inoubliable entre nous. Au-delà, sans doute, des mots, ces martyrisés. Qui nous en auront fait voir...
11:22 Publié dans Georges Perros | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : perros, noël
31/03/2010
A la vie
Poésie ininterrompue de Paul Eluard est un invraisemblable poème de trente pages que l'on peut à chaque lecture redécouvrir, éprouvant selon l'humeur ou l'heure, un mélange confus d'exaltation et de rejet. Mais sa touche finale est une caresse que le temps n'évince pas :
Quand au printemps c'est l'aube
et la bouche c'est l'aube
et les yeux immortels
ont la forme de tout
nous deux toi toute nue
moi tel que j'ai vécu
toi la source du sang
et moi les mains ouvertes
comme des yeux
Nous deux nous ne vivons que pour être fidèles
à la vie
20:55 Publié dans Paul Eluard | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : éluard
28/03/2010
Une branche, une sente...
Lire de la poésie tient parfois du jeu de piste... Voyage étrange et fantastique au gré de vallées ou sur la frange d'une canopée. On se laisse aller au gré des voix amies à emprunter de nouvelles sentes, à se hisser sur de nouvelles branches... Ainsi Bernard Noël apparaît comme passeur/préfaceur d'un recueil intitulé L'autre temps, sagement rangé sur une étagère de la belle librairie Papiers Collés (Eh oui, Perros encore...) de Draguignan et l'on découvre Roger Giroux et une nouvelle terre se dévoile :
Mais que savent les mots ?
Les mots font ce qu'ils peuvent :
des fous, des rois, des pions,
selon leur ordonnance et les limites de l'espace
où nous allons. Ce qui se passe
au fond du coeur, c'est une autre chanson :
des lueurs, des sons, venus d'ailleurs,
d'un autre âge peut-être, on ne sait pas.
Puis cela meurt...
21:00 Publié dans Roger Giroux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : giroux
25/03/2010
Une promesse
Comme un jeu intime entre le poète et son lecteur : prendre un recueil estimé, fermer les yeux, tourner les pages au hasard, laisser son doigt glisser sur la page, ludique et poétique tombola. Puis lire et relire l'unique vers ainsi choisi. Et s'en faire, pour un instant, une nuit ou une vie, une maxime inestimable. Aujourd'hui, jouons avec René Char :
L'homme est capable de faire ce qu'il est incapable d'imaginer. Sa tête sillonne la galaxie de l'absurde.
23:02 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : char
23/03/2010
Chercher le sens... ou pas
La lecture de certains poètes - peu importe les noms, chacun en trouvera bien un exemple - soulève parfois une lancinante et pesante question : mais qu'a-t-il donc voulu dire ? Ce à quoi ce cher Perros répond avec acuité :
Demander le sens d'un vers, c'est vouloir en savoir plus long que le poète lui-même. Le sens d'un vers c'est et ce ne peut-être que le vers lui- même. Le poète s'embarasse, manque "d'esprit" si jamais il croit pouvoir signifier autrement que par la poésie. Et donne des regrets. Comme navre la possession, par une sotte d'un diamant.
23:24 Publié dans Georges Perros | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : perros
22/03/2010
Une correspondance
Nous sommes en 1960. Bernard Noël écrit pour la première fois à Georges Perros après avoir lu Papiers Collés 1. C'est le début d'une correspondance rare et magnifique, toujours disponible aux précieuses éditions Unes, qui rend encore plus estimable les oeuvres de chacun de ces hommes de lettres.
Il y a une certaine étendue de moi qui s'est trouvée plus vaste après vous avoir lu.
22:16 Publié dans Bernard Noël | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : noël, perros