Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

14/03/2018

Le Thor

ventoux.jpg

Car le poème est aussi, souvent, l'assistant de la mémoire... un partage formel comme le relevait René Char...

Le poète recommande : " Penchez-vous, penchez-vous davantage." Il ne sort pas toujours indemne de sa page, mais comme le pauvre il sait tirer parti de l'éternité de l'olive.

... et de relever à chaque instant de son oeuvre ce défi dérisoire et magnifique, donner vie à l'éternité de l'infime et du fugitif, mouvement accompli entre autre dans Le Thor, poème de 1947.

Dans le sentier aux herbes engourdies où nous nous étonnions, enfants, que la nuit se risquât à passer, les guêpes n'allaient plus aux ronces et les oiseaux aux branches. L'air ouvrait aux hôtes de la matinée sa turbulente immensité. Ce n'était que filaments d'ailes, tentation de crier, voltige entre lumière et transparence. Le Thor s'exaltait sur la lyre des pierres. Le mont Ventoux, miroir des aigles, était en vue. dans le sentier aux herbes engourdies, la chimère d'un âge perdu souriait à nos jeunes larmes.

 

09:14 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0)

23/08/2015

Dentelles poétiques

La tentation fut grande de stopper sur un compte rond : 5 ans, 300 notes, 60 poètes cités.

L'équation était parfaite mais c'était sans compter sur René Char et les Dentelles de Montmirail.

Un poète, une montagne du Sud, féérie de calcaires et de vignes. Un homme qui marche, bâton en main, mots en tête et les bons comptes s'effacèrent derrière ces fulgurances poétiques.

Aussi le voyage se poursuit, au rythme lent de la contemplation. Imaginons maintenant le pas lourd de René Char, colosse d'argile, laissant glisser son regard sur la roche et le ciel, dialoguant avec la montagne, sa mémoire et un rien d'éternité.

Au sommet du mont, parmi les cailloux, les trompettes de terre cuite des hommes des vieilles gelées blanches pépiaient comme de petits aigles.

Pour une douleur drue, s'il y a douleur.

La poésie vit d'insomnie perpétuelle.

Il semble que ce soit le ciel qui ait le dernier mot. Mais il le prononce à voix si basse que nul ne l'entend jamais.

Il n'y a pas de repli, seulement une patience millénaire sur laquelle nous sommes appuyés.

Dormez, désespérés, c'est bientôt jour, un jour d'hiver.

Nous n'avons qu'une ressource avec la mort : faire de l'art avant elle.

 

 

09:03 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0)

18/08/2014

La frontière en pointillé

Vous remontez du Sud au Nord, et c'est comme si vous aviez laissé, sur une piste de pierre et de pins, un paragraphe de votre histoire. Des mots de lumière et d'ombre cherchent leur ciel et leur ravine. Dans ce voyage vous avez perdu le verbe. Et dans le silence du soir, seul un habitué des mêmes voyages, comme René Char, peut vous le rendre. Trois extraits de La frontière en pointillé.

Nous sommes lucioles sur la brisure du jour. Nous reposons sur un fond de vase, comme une barge échouée.

Pris aux esprits de l'air. Donné aux verges de la terre. Déjà en naissant, nous n'étions qu'un souvenir. Il fallut l'emplir d'air et de douleur pour qu'il parvînt à ce présent.

Le trèfle obscurci... La cicatrice verte. La trombe de la souffrance, le balluchon de l'espoir.

22:44 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0)

07/03/2014

Notes solaires

Tant pis pour le cliché, mais le soleil sied bien mieux aux pages de René Char que le gris de l'hiver. Sous la lumière et l'azur, certaine notes des Feuillets d'Hypnos deviennent solaires, s'éclairent et chantent autrement. Elles n'en demeurent moins pas riche du mystère et de la tension qui les firent naître au creux de la guerre.

 

156. Accumule, puis distribue. Sois la partie du miroir de l'univers la plus dense, la plus utile et la moins apparente.

 

163. Chante ta soif  irisée.

 

169. La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil.

 

182. Lyre pour des monts internés.

 

212. Enfonce-toi dans l'inconnu qui creuse. Oblige-toi à tournoyer.

08:28 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0)

15/05/2013

Dans les pas de Char

A L'Isle-sur-la-Sorgue, guère de traces de René Char : un vilain cours embouteillé, pas même un livre en devanture des librairies. Pour le retrouver il faut prendre l'air, fouiller l'invisible des collines, humer les tapis de pierres, frémir dans les corridors qu'emprunte le vent, de Montmirail au Ventoux, dans le silence de ses pas...

Les sentiers, les entailles qui longent invisiblement la route, sont notre unique route, à nous qui parlons pour vivre, qui dormons, sans nous engourdir, sur le côté.

23:17 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0)

03/03/2013

Hommage aux passeurs

Une pensée ce jour pour les passeurs de poésie, ces grands lecteurs qui donnent à toute langue poétique un passeport d'éternité... En lisant, inlassablement, en donnant à lire, en récitant, en chantant, en allant au vent un poème en bandoulière...

Trois d'entre eux sont partis coup sur coup et ce sont trois voix qui manqueront : Alain Gheerbrant, l'un des éditeurs d'Antonin Artaud et d'Aimé Césaire, Stéphane Hessel, est-il utile de le présenter ?, et l'astre noir, Daniel Darc.

Pour eux, ces quelques lignes du poète absolu, René Char; miroirs de l'amour qu'ils portèrent tous au pouvoir jamais éteint du poème...

Dans le chaos d'une avalanche, deux pierres s'épousant au bond purent s'aimer nues dans l'espace. L'eau de neige qui les engloutit s'étonna de leur mousse ardente.

L'homme fut sûrement le voeu le plus fou des ténèbres : c'est pourquoi nous sommes ténébreux, envieux et fous sous le puissant soleil.

Poésie, unique montée des hommes, que le soleil des morts ne peut assombrir dans l'infini parfait et burlesque.

09:12 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0)

04/01/2013

Au matin de l'an neuf

Premiers jours de l'année... Considérons qu'il s'agit du matin de l'an neuf et, par une subtile analogie, allons-donc puiser dans Les Matinaux de René Char quelques lignes pour entamer cette nouvelle journée de nos vies sous les meilleurs auspices possibles.

Que l'on s'emploie en 2013 à gravir une falaise, s'initier au trapèze ou entamer une silencieuse ascèse, ces quelques mots du maître de la Sorgue auront peut-être leur utilité.

Il faut souffler sur quelques lueurs pour faire de la bonne lumière. Beaux yeux brûlés parachèvent le don.

***

Imite le moins possible les hommes dans leur énigmatique maladie de faire des noeuds.

***

Enfin, si tu détruis, que ce soit avec des outils nuptiaux.

 

22:26 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0)

20/10/2012

Le smoking de Maïakovski

A la mort de Maïakovski, René Char reçut, en souvenir, des mains d'Elsa Triolet le smoking du poète russe. Peut-être est-ce revêtu de cette tenue, et en mémoire de ce deuil, qu'il composa plus tard ces lignes que l'on trouvera dans La parole en archipel...

Nous avons en nous d'immenses étendues que nous n'arriverons jamais à talonner; mais elles sont utiles à l'âpreté de nos climats, propices à notre éveil comme à nos perditions.

21:45 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0)

20/09/2012

Char encore

Oui, Char encore, une dernière salve. La poésie faite homme, comme la roche fait la montagne, la racine l'arbre. Un lien inaltérable avec un temps où une voix pouvait incarner dans toute sa densité le verbe du poème. Ce temps demeure, il vit au coeur de la nuit, dans la lumière blanche et dorée de La parole en archipel.

La seule signature au bas de la vie blanche, c'est la poésie qui la dessine. Et toujours entre notre coeur éclaté et la cascade apparue.

21:10 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0)

17/09/2012

Contrevenir

Alain Gheerbrant associait les poètes aux chamans et aux derviches, unis en une famille commune : des êtres poreux. Entendre et ressentir, sans forcèment comprendre, la parole d'un poète, c'est accepter cette dimension : transcendance, foi dans le verbe, goût du sacré et du mystère, ombre et lumière...

Peut-être est-ce sous cet angle que l'on peut lire l'énigmatique, et violent, poème de René Char, Contrevenir...

Obéissez à vos porcs qui existent. Je me soumets à mes dieux qui n'existent pas.

Nous restons gens d'inclémence.

13:53 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0)