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28/02/2010

Insomnie

Les causes d'une insomnie peuvent être multiples. Celle-ci, avancée par Roberto Juarroz, n'a pas valeur universelle mais résonnera peut-être avec douceur en certains d'entre vous.

Je me suis réveillé trop tôt

et j'ai commencé à penser à l'éternel,

non pas à la grande éternité des prières

mais aux petites éternités oubliées.


La part du fleuve qui ne coule pas,

ce qui toujours se tait en la ville,

le lieu qui ne dort pas en ton corps endormi,

ce qui ne veille pas en mon corps éveillé,


Ainsi j'ai compris que les petites éternités

sont préférables à la grande éternité.

Et je n'ai pu me rendormir.

20:14 Publié dans Roberto Juarroz | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : juarroz

25/02/2010

Vieillir

On est encore loin du but bien sûr, mais quelques signes ne trompent pas, la courbe du temps s'engage dans un axe que l'on observe avec méfiance... Il est alors bon de se prémunir et de s'armer auprès des meilleures sources. Pour la vitalité, allons donc voir du côté d'Eluard, il y a de la matière.

Je vis d'un élan constant

arriver est un départ

Vieillir c'est organiser

sa jeunesse au cours des ans

C'est mûrir mille jeunesses

par étés et par automnes

Tenir son vol assez haut

pour que l'aile y ait un but

C'est ruiner l'ombre quotidienne

sur des sommets perpétuels

C'est faire honneur à l'avenir

21:36 Publié dans Paul Eluard | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : eluard

22/02/2010

Un exil

Des vies de poètes, d'écrivains, de penseurs, brisées par des pouvoirs ivres de bêtise, il y en eut beaucoup, beaucoup trop. Celle de Ion Caraion, roumain, onze années de prison sous Ceaucescu, en est une parmi d'autres. De son exil suisse nous est parvenu un recueil, La neige qui jamais ne neige où l'on trouve ceci :

Je fus l'ami de toutes les solitudes.

J'allumais des lampes parmi les errants.

Le soir je prenais un peu de thé, ou même pas.

Les chemins se sont resserrés dans le passé -

et voici venir l'oubli.

(...)

La vie fut toujours comme ne devrait pas être la vie.

21:59 Publié dans Ion Caraion | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : caraion

19/02/2010

Labyrinthes

Le recueil A distance paru en 1997 a offert aux lecteurs d'Henri Michaux un rêve éveillé : plus d'une centaine de pages de textes rares, seulement publiés en revues et jamais repris ailleurs, ou carrément inédits. L'occasion de constater l'implacable exigence de l'auteur qui laissait de côté des poèmes d'une rare qualité et de vérifier son extraordinaire don d'observation d'un monde invraisemblable, le nôtre.

Des pistons comptent les moments, les moments à prendre, les moments perdus, les moments qu'il faut attraper, consommer sur le champ sans cesse.

A perte de vue des entraîneurs, des moniteurs, des préposés aux nouvelles commentent.

Et on entend indéfiniment des dénombrements.

Dégagements. Inutiles dégagements.

Les nouvelles progressions conduisent à de nouveaux labyrinthes. Règne des labyrinthes.

Des êtres moitié homme moitié chien, à qui on a appris à parler, répètent des mots avec application.

 

22:24 Publié dans Henri Michaux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : michaux

16/02/2010

L'ami blessé

Souvent les poètes qui visitent ces pages y déposent des lignes douloureuses. Nulle complaisance, c'est juste que leurs mots furent parfois des refuges en des temps délicats. Georges Perros exprime fort bien ce lien qui nous unit à ces amis blessés :

On est si étrangement fait que dans nos moments de détresse on préfère les oeuvres moroses aux oeuvres heureuses. L'ami, c'est celui qui a souffert aussi terriblement, et l'a dit. Mais celui qui s'est efforcé de réjouir, on ne saurait penser qu'il a dû passer par ce malheur.

18:21 Publié dans Georges Perros | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : perros

12/02/2010

Grammaire

Alfredo Gangotena est un poète équatorien bien oublié mais dont la vie eut une importance fondamentale pour un autre poète fort peu oublié, lui, Henri Michaux. Une belle amitié les liait et c'est à l'invitation de Gangotena que Michaux se rendit en Equateur en 1929. Le journal de ce voyage connu sous le nom d'Ecuador semble tout entier marqué du sceau d'une fort belle pensée de Gangotena sur ce qu'est avant tout l'acte poétique :

J'apprends la grammaire

de ma pensée solitaire

11/02/2010

Traverser le temps

Bernard Noël est à l'honneur de l'irremplaçable revue Le Matricules des anges (n°110 Février 2010 en vente dans tout ce qui ressemble à une bonne librairie). Vox Poetik en profite pour dire encore une fois que c'est l'un des écrivains, poètes, penseurs les plus essentiels de ce temps. Extrait du Dieu des poètes :

Quiconque s'engage dans l'écriture sent bien que le langage n'est pas toujours la mémoire des choses, mais plus souvent la rumeur d'un monde antelangagier, que nous sommes incapables d'articuler et dont nous traduisons seulement, ici et là, quelques images. D'où notre angoisse au bord d'écrire, puis l'allégresse de le faire parce que, un instant, nous avons traversé le temps.

07/02/2010

A la nuit

Il est des poèmes que l'on n'aime pas lire. On les voudrait effacer. Mais toujours ils ressurgissent. A la nuit qui se refuse au sommeil ils sonnent comme corne de brume. Ils s'invitent et s'imposent. Alors on les relit et l'on sait qu'ils seront nôtres, à jamais.

J'ai des jours

qui ne servent plus, je vous

les donne, ils pourraient

grandir chez les autres, être légers,

soyeux, pleins de soleil,

moi, je les mets dans une boîte

grise sous la terre

et je les vois pourrir, prenez les moi,

faites qu'ils vivent,

qu'ils deviennent des enfanst qui jouent.

Claude Esteban

 

01:21 Publié dans Claude Esteban | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : esteban

05/02/2010

Un poète portugais dans un café

Nombre d'actes poétiques ont commencé comme ça : une table de café, le regard d'une jolie fille, un carnet et des mots comme seules paroles. Merci à Nuno Judice de le rappeler.

Dans un coin du café, ce que tu recherches, c'est que le

poème

te dise qui tu es, pourquoi tu te caches, quel est le nom

de la fille qui t'a regardé fixement.

Et tu n'as pas de réponse. La réponse

était sur les lèvres de cette fille que

ton silence n'a pas su interroger ;

et dans le vent qui balayait l'esplanade,

emportant feuilles et papiers.

21:12 Publié dans Nuno Judice | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : judice

02/02/2010

Tamis

Il y a au frontispice de ce blog un mot ami : tamis. Un mot-fétiche, un mot-amulette, un mot qui, bizarrement, n'avait pas encore trouvé son reflet dans un autre poème. C'est chose faite avec cette page de Pierre Reverdy extraite du Chant des morts, un recueil hanté par la folie guerrière des années 40.

Je ne peux pas choisir ce que je voudrais dire

Le crêpe luit

La fête bat son plein

Le coeur qui flotte au vent

La nuit me sert de cible

Dans le tamis des jours flétris

Il y a la cire

et le miel de ta chevelure

Dans la marée montante du matin

 

 

21:56 Publié dans Pierre Reverdy | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : reverdy