31/01/2010
Le poème sera notre parole
Il est des poèmes qui défient le commentaire, qui font masse. Inscrits dans un temps qui n'est plus que crépuscule, on les découvre, tétanisé mais réconforté de savoir que quand viendra le moment de l'indicible, ces poèmes seront là pour être notre parole. Claude Esteban dans Sept jours d'hier :
Donnez-moi ce matin, ces heures
encore du petit matin
quand tout commence, donnez-moi, je vous prie
ce mouvement léger des branches,
un souffle, rien de plus,
et que je sois comme quelqu'un
qui se réveille dans le monde et qui ne sait
ni ce qui vient ni ce qui va
mourir, donnez-moi
juste un peu de ciel, ou ce caillou.
21:50 Publié dans Claude Esteban | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : esteban
30/01/2010
Politique
Par essence la poésie est aux antipodes de la politique. Mais lorsque la politique met en scène comme ces jours-ci un homme qui se dit féru de poésie et qui, crinière blanche au vent et verbe haut, en combat un autre, on a envie d'appeler encore une fois René Char à la rescousse :
Je vois l'homme perdu de perversions politiques, confondant action et expiation, nommant conquête son anéantissement.
21:36 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : char, hypnos
28/01/2010
Vivre davantage
Homme de théâtre, poète, diariste, Perros fut avant tout un lecteur, un immense lecteur. De ceux dont les libraires d'aujourd'hui déplorent la disparition lente et inexorable. Dans Papiers collés 3 Perros donne la plus belle des justifications à cet acte de plus en plus singulier qu'est la lecture.
Je ne dirai jamais de mal de la littérature. Aimer lire est une passion, un espoir de vivre davantage, autrement, mais davantage que prévu.
23:27 Publié dans Georges Perros | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : perros
25/01/2010
L'espace du dedans
A qui n'a jamais lu Henri Michaux on met souvent entre les mains Plume, ce qui n'est pas un mauvais choix car entendons-nous bien, rien n'est mauvais chez Michaux. S'il est moins connu, c'est pourtant vers un autre recueil qu'il convient de se tourner : L'espace du dedans. Tout simplement parce qu'il fut conçu par Michaux lui-même qui se plongeait alors dans une entreprise étrange : s'auto-réduire en un choix de pages qu'il achève par l'un de ses plus extraordinaires poèmes, Paix dans les brisements.
purifié des masses
purifié des densités
tous rapports purifiés dans le miroir des miroirs
éclairé par ce qui m'éteint
porté par ce qui me noie
je suis fleuve dans le fleuve qui passe
22:31 Publié dans Henri Michaux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : michaux
23/01/2010
Savoir voir (2)
Avant l'injonction de René Char, toute entière marquée par l'atrocité d'un temps de guerre, Fernando Pessoa sous la plume curieuse d'Alberto Caeiro avait posé la question du savoir voir en des termes un brin plus complexes, une sorte de merveilleuse équation poétique...
L'essentiel est de savoir voir,
savoir voir sans se mettre à penser,
savoir voir quand on voit,
et ne pas penser quand on voit
ni voir quand on pense.
19:22 Publié dans Fernando Pessoa | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pessoa, char
22/01/2010
Savoir voir
Cette sensation brutale face à certain spectacle quotidien : dans la rue, le métro, on voit chez nos semblables ce qui ne mérite pas d'être vu. Se remémorer alors le verset 59 des Feuillets d'Hypnos de René Char :
Si l'homme ne fermait pas souverainement les yeux, il finirait par ne plus voir ce qui vaut d'être regardé.
22:21 Publié dans René Char | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : char
20/01/2010
Méditation
Marcher longuement. Ou courir. Lancer son corps, en tout cas, dans un mouvement d'épuisement. Séparer les uns après les autres toutes les strates de son être. Et se répéter quelques phrases, minces et parfaits métronomes, dont celle-ci de Bernard Noël :
Il n'y a pas de raison d'être. Etre, c'est vivre l'impossible jusqu'à s'en faire une raison.
22:27 Publié dans Bernard Noël | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : noël
17/01/2010
Enfance
Par la fenêtre d'un train défile un paysage que soudain l'on reconnaît ou qui nous renvoie comme une fulgurance à un espace de l'enfance. L'expérience est troublante, bouleversante même, et lorsqu'à la faveur du passage du train sous un tunnel on découvre son visage en reflet, on pensera à Pessoa :
Enfant j'étais un autre.
En celui que je suis devenu
j'ai grandi, j'ai oublié.
M'appartiennent à présent un silence, une loi.
Ai-je gagné ou perdu ?
10:11 Publié dans Fernando Pessoa | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pessoa
15/01/2010
Qu'attendre...
Qu'attendre de la poésie ? Fragments d'un autre rencontrés au creux de la nuit, miroir touchant, bréviaire des heures silencieuses et parfois, comme l'a dit Antonin Artaud dans Le pèse-nerfs,
Se retrouver dans un état d'extrême secousse, éclaircie d'irréalité, avec dans un un coin de soi-même des morceaux du monde réel.
21:38 Publié dans Antonin Artaud | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : artaud
13/01/2010
Obstination de la poésie
C'est le titre d'un long papier de Jacques Roubaud publié dans Le Monde Diplomatique de janvier. C'est drôle et intelligent, tout autant qu'accablant et revigorant. Cet état des lieux de la sphère poésie contemporaine s'achève par un plaidoyer en forme d'injonction auquel Vox Poetik souscrit pleinement : "la poésie doit se lire et dire". Respect pour cet homme qui se dit un jour "technicien de surface poétique" et pour la constance de sa pensée et de sa foi en la poésie, lui qui écrivait déjà en 1998 :
poésie
que nous avons lue et dite et parlée
tant que la source du temps
a compté encore des jours
07:24 Publié dans Jacques Roubaud | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roubaud