29/03/2011
La voix Robin
C'est une voix de révolte que celle d'Armand Robin, une voix qui s'éteignit une nuit de 1961 dans un dépôt de la police française. Une voix qu'il serait bon de réécouter un peu plus souvent asséner ce genre de vérité :
Surgi des illetrés, je n'ai eu personne pour m'expliquer
combien il faut mentir pour être sauvé
je veux être, non pas génie, mais ortie piquant la fausseté.
Ma motte de tête en flamme, ma tête incendiée
on ne l'éteindra jamais
Egorgés cri par cri nous sommes tous Maïakovski.
21:47 Publié dans Armand Robin | Lien permanent | Commentaires (0)
24/03/2011
"Un poème bien à moi", dit Fernando Pessoa...
On a déjà évoqué les multiples personnalités poétiques de Pessoa, on a dit l'éblouissement face à ce génie, on sait que sur la mappemonde littéraire, Pessoa est un continent en soi... mais a-t-on vraiment mesuré à quel point cela fut aussi cause de désarroi que d'être autant dans l'esprit d'un seul ? Dans le Cancioneiro, on trouve cet aveu, ce souhait, ce cri...
Je ferai peut-être un jour un poème à moi,
un poème bien à moi, où faire aller mon être,
où dire ce que je sens et ce que je suis,
le dire sans penser, sans feindre et sans vouloir,
comme un vrai lieu, celui où vraiment je me trouve,
où l'on pourrait me voir tel que vraiment je suis.
Ah, mais qui est capable d'être celui qu'il est ?
Qui est celui qu'il est ? Qui ?... Ombres de nous-mêmes,
nous sommes condamnés par nature au reflet.
Mais au reflet, branches irréelles de quoi ?
Peut-être du vent seul qui nous ferme et nous ouvre.
18:00 Publié dans Fernando Pessoa | Lien permanent | Commentaires (0)
06/03/2011
Michaux et Celan
Quand en Avril 1970 Paul Celan met fin à ses jours en se jetant dans la Seine, Henri Michaux écrit Le jour, les jours, la fin des jours qu'il sous-titre Méditation sur la fin de Paul Celan. Il semble qu'il s'agit de la seule dédicace explicite dans l'oeuvre de Michaux. Il est certain que c'est l'un des plus saisissants portraits de l'absolue détresse qui emporte certains d'entre nous.
Sans qu'ils parlent, lapidé par leurs pensées
Encore un jour de moindre niveau. Gestes sans ombres
A quel siècle faut-il se pencher pour s'apercevoir ?
Fougères, fougères, on dirait des soupirs, partout, des soupirs
Le vent éparpille les feuilles détachées
Force des brancards, il y a dix huit cent mille ans on naissait
déjà pour pourrir, pour périr, pour souffrir
Ce jour, on en a déjà eu de pareils
quantité de pareils
jour où le vent s'engouffre
jour aux pensées insoutenables
Je vois les hommes immobiles
couchés dans les chalands
Partir.
De toute façon partir.
Le long couteau du flot de l'eau arrêtera la parole.
23:47 Publié dans Henri Michaux | Lien permanent | Commentaires (0)