05/11/2012
Marcher dans des paysages de peu
Associez marche et écrits, et inévitablement vous tomberez sur Nicolas Bouvier. Toute son oeuvre est un appel au départ, à la déambulation, une invitation à cheminer au gré des routes et des sentes, aux quatre vents, sur tous les continents... Dans Journal d'Aran et d'autres lieux, on le retrouve en Irlande, un bout du monde en hiver...
Dans ces paysages faits de peu je me sens chez moi, et marcher seul, au chaud sous la laine sur une route d'hiver est un exercice salubre et litanique qui donne à ce peu - en nous ou au-dehors - sa chance d'être perçu, pesé juste, exactement timbré dans une partition plus vaste, toujours présente mais dont notre surdité au monde nous prive trop souvent.
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15/12/2011
La dernière douane
Comme un écho aux mots de Claude Esteban, voici la parole de Nicolas Bouvier. Voix du crépuscule, lucide et limpide, un espoir dans l'ourlet du linceul...
Depuis que le silence
n'est plus le père de la musique
depuis que la parole a fini d'avouer
qu'elle ne nous conduit qu'au silence
les gouttières pleurent
il fait noir et il pleut
Dans l'oubli des noms et des souvenirs
il reste quelque chose à dire
entre cette pluie et Celle qu'on attend
entre le sarcasme et le testament
entre les trois coups de l'horloge
et les deux battements du sang
Mais par où commencer
depuis que le midi du pré
refuse de dire pourquoi
nous ne comprenons la simplicité
que quand le coeur se brise.
23:34 Publié dans Nicolas Bouvier | Lien permanent | Commentaires (0)
12/12/2010
Retrouvailles
Un recueil avait disparu de la bibliothèque, il réapparaît et c'est un bonheur. Le dehors et le dedans est le seul volume de poèmes laissé par Nicolas Bouvier, grand voyageur certes, mais surtout immense écrivain. Pour fêter ces retrouvailles voici, in extenso, Love song III, daté de décembre 1977.
Quand tisonner les mots pour un peu de couleur
ne sera plus ton affaire
quand le rouge du sorbier et la cambrure des filles
ne te feront plus regretter ta jeunesse
quand un nouveau visage tout écorné d'absence
ne fera plus trembler ce que tu croyais solide
quand le froid aura pris congé du froid
et l'oubli dit adieu à l'oubli
quand tout aura revêtu la silencieuse opacité du houx
ce jour-là
quelqu'un t'attendra au bord du chemin
pour te dire que c'était bien ainsi
que tu devais terminer ton voyage
démuni
tout à fait démuni
alors peut-être...
mais que la neige tombé cette nuit
soit aussi comme un doigt sur ta bouche.
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